Louis VII, un roi mou face aux puissants Plantagenêts
(1137 - 1180)

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Louis VII, un roi mou et dévot

Il devient roi à 18 ans à la mort de son père Louis VI en 1137, qui a fait faire au royaume de France des progrès conséquents.
Assez intelligent selon ses contemporains, il est en revanche mou dans ses décisions et dévot : probablement car il avait suivi une éducation au cloître et était destiné à une carrière ecclésiastique jusqu'à ce que son frère aîné, prétendant au trône, ne succombe à un accident de cheval. Il avait donc plus le profil d'un lettré ou d'un moine que celui d'un monarque.

Son mariage avec Aliénor d'Aquitaine en 1137 (organisé par Louis VI juste avant de mourir et l'abbé Suger) faisait pourtant de lui un monarque puissant et riche : le père de cette dernière, Guillaume X, est le dernier duc d'Aquitaine et de Gascogne et laisse à sa fille Aliénor son duché.
Ce mariage apporte donc en dot 19 de nos départements au royaume, localisés entre la Loire, les Pyrénées et la côte Atlantique.

Une affaire malheureuse marque le début du règne de Louis VII : durant la guerre contre le comte Tibaud de Champagne en 1142, il prend d'assaut la ville de Vitry-en-Perthois. Il y fait mettre le feu et plus de 1000 personnes périssent dans l'église dans laquelle ils avaient trouvé refuge.
Cet événement aura un grand retentissement dans toute la chrétienté et en signe de repenti, le roi décidera de se croiser, ce qu'il fera 3 années plus tard.

L'échec de la 2ème Croisade (1147 - 1149)

Profitant des rivalités au sein du royaume de Jérusalem, les turcs envahissent le comté d'Edesse en 1144 en massacrant de nombreux chrétiens.

A la demande de Louis VII et sur les conseils de Saint Bernard, le pape Eugène III prêche cette 2ème croisade en 1145 ou 1146.
Cette dernière ne rencontre pas l'enthousiasme de la 1ère croisade. C'est accompagné de sa femme Aliénor d'Aquitaine et de l'empereur d'Allemagne Conrad III que Louis VII se coalise.

Après avoir longé le Danube, les armées française et allemande, fortes d'environ 50000 hommes, se rejoignent à Constantinople (ex Byzance, future Istanbul) et l'expédition est un échec total pour diverses raisons :

  • la discorde entre le clan français et allemand,
  • la perfidie des byzantins qui nuisent plus aux chrétiens qu'ils ne les aident,
  • l'inexpérience de Louis VII qui se montre plus velléitaire que jamais.
Après un cuisant échec devant Damas (le siège de la ville ne durera que 4 jours !), Louis VII décide de rentrer en France : son prestige est fortement entamé mais l'excellente régence de Suger a su conserver au royaume sa puissance. L'échec de cette 2ème croisade sera attribué par l'opinion populaire aux excès de pêchés des puissants (luxe, orgueil) : ainsi naîtra l'idée d'une croisade pacifique réservée aux enfants pauvres, sans autres armes que la pureté et la prière. Hélas, cette croisade échouera misérablement en 1212.

Après le départ des croisés, le prince d'Antioche Raymond de Poitiers va tenter avec 400 chevaliers et 1000 fantassins de prendre sa revanche : tous ses soldats seront massacrés et sa tête sera envoyée momifiée au calife de Bagdad !

La répudiation et le remariage d'Aliénor d'Aquitaine

Les caractères de l'acétique Louis VII (le Saint Moine) et de sa sensuelle épouse Aliénor d'Aquitaine (la Folle Reine) sont opposés. La Reine aurait confié à un de ses familiers : "J'ai parfois l'impression d'avoir épousé un moine !".

Leur mésentente est mise en exergue lors de la 2ème croisade : la conduite adultère de la reine avec son oncle Raymond de Poitiers ridiculise le roi et avive les disputes au sein du couple royal.

Prétextant un cousinage au 5ème degré entre les époux, le mariage est annulé à la demande de Louis VII par un concile d'évêques en 1152.
Cette séparation va avoir des conséquences politiques considérables car en plus de la perte de la dot représentant 19 de nos départements, l'ex reine de France se marie deux mois plus tard avec le comte d'Anjou, Henri de Plantagenêt, qui deviendra 2 ans plus tard roi d'Angleterre sous le nom de Henri II en 1154.

Aliénor était très cultivée

Elle tenait sur ses terres, notamment à Poitiers et à Limoges, une cour raffinée et brillante où se réunissaient les plus fins lettrés, des troubadours et des musiciens.

Citation d'un troubadour :
"Le monde serait-il mien de la mer au Rhin que je donnerais tout si la reine anglaise était mienne un seul jour".

Elle est représentée sur cette enluminure assise
entre un musicien et deux joueurs de dés.

Gisant d'Aliénor

Son gisant se trouve à l'abbaye de Frontevault sur ses terres natales.

Elle est représentée sur son gisant tenant un livre ouvert dans ses mains, pour mettre en lumière sa grande érudition.


La puissance croissante de la famille Plantagenêts

Mathilde, fille héritière d'Henri I d'Angleterre (fils de Guillaume le Conquérant), épouse le comte d'Anjou Geoffroy Plantagenêt en 1128.

Surnom de " Plantagenêts"

Il s'expliquerait par l'habitude du père de Mathilde de piquer une branche de genêt à son couvre-chef.

Leur fils, Henri II, devient roi d'Angleterre en 1154 après avoir épousé Aliénor d'Aquitaine, et contrôle progressivement plus du tiers de la France :

  • La Normandie : bien qu'arrière petit-fils de Guillaume le Conquérant (qui était duc de Normandie), Henri II devra guerroyer pour s'emparer du duché,
  • L'Anjou et le Maine par héritage de son père qui était comte de ces territoires,
  • L'Aquitaine par son mariage avec Aliénor d'Aquitaine en 1152 (qui deviendra reine d'Angleterre après son tumultueux divorce avec Louis VII),
  • La Bretagne par le mariage d'un de ses fils avec l'héritière du duché de Bretagne.
  • Conflits entre les royaumes français et anglais

    Henri II règne sur un territoire qui s'étend de l'Ecosse aux Pyrénées, comprenant Angleterre, Anjou, Maine, Normandie, Aquitaine et Bretagne : il est donc évident que cette situation hégémonique sera la source d'un conflit chronique entre Louis VII et Henri II, qui reste le vassal du roi de France !

    Mais malgré la disproportion entre les deux Etats et la maladresse de Louis VII, la situation ne va pas basculer en la faveur des anglais :

    • Le despotisme d'Henri II va fournir des alliés à Louis VII, parmi lesquels on peut citer les seigneurs bretons ou aquitains : pourquoi ces seigneurs obéiraient à un roi qui oublie son droit féodal à l'égard de Louis VII ? Ce dernier va débaucher certains vassaux du roi d'Angleterre en se positionnant comme un allié : ces révoltes de grands vassaux vont ainsi "craqueler" l'empire angevin,
    • Le clergé va prendre position pour Louis VII, en signe de sa dévotion et des liens étroits entre l'épiscopat et la royauté capétienne. L'assassinat de Thomas Becket, archevêque de Canterbury, par des disciples d'Henri II en 1170 va encore mettre en lumière le despotisme et la brutalité du roi d'Angleterre, sévèrement jugé par l'Eglise,
    • Les fils d'Henri II vont s'opposer à leur père en exigeant des territoires, situation dans laquelle Louis VII n'hésite pas à se présenter comme un protecteur en les accueillant à sa cour !


    Gisant d'Henri II de Plantagenêt
    à l'abbaye de Fontevraud

    Ainsi, après avoir commis de nombreuses fautes, Louis VII est parvenu à sauver son royaume en contenant les Plantagenêts : après des affrontements militaires mineurs mais surtout une guerre "diplomatique", le Pape va obtenir la réconciliation des deux monarques à Nonencourt en 1177.

    Nous verrons toutefois que ce conflit se poursuivra avec le fils de Louis VII (Philippe Auguste) et celui d'Henri II (Richard Coeur de Lion puis Jean sans Terre) … avant de devenir la " guerre de Cent ans " en 1328.

    En fait, le meilleur service que Louis VII rendra au royaume sera d'avoir enfin un fils après 27 ans de mariage et 3 femmes : son successeur et héritier, Philippe Auguste, sera en effet l'un des plus grands monarques de l'histoire de France.

     

    Une France qui évolue

    Cette période est marquée par de nombreuses évolutions :

    • L'agriculture se transforme et gagne en productivité grâce à l'usage de charrues dotées de roues, d'un soc métallique et d'un collier pour boeufs.

    Longtemps, les attelages de boeufs sont restés un luxe réservé aux seuls riches : il n'était pas rare qu'un serf tire lui-même la herse ou la charrue comme le montre la représentation ci-contre.
    Ces pratiques vont progressivement reculer lorsque de nouveaux pâturages conquis sur la friche permettront un développement de l'élevage.

    • La population augmente,
    • Le commerce et l'industrie se développent,
    • Une véritable renaissance intellectuelle apparaît : la littérature courtoise se développe entre autres dans le nord de la France et Chrétien de Troyes, plus grand romancier du Moyen-Age (dont la vie nous est totalement inconnue), initialise le "Conte du Graal".
    • Les châteaux forts sont construits en pierre :

    A partir du XIIe, des constructions en pierre remplacent systématiquement les constructions en bois localisées en haut d'une motte.

    Les 1ères constructions en pierre datent en fait de la fin du Xe (donjon du comte d'Anjou) mais elles constituaient des exceptions.


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