Un 1er roi d'envergure :
Louis VI (1108 - 1137)

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Un 1er roi d'envergure, "Louis le Gros" : 1108 - 1137

Louis VI succède à Philippe Ier en 1108 : son obésité lui vaudra auprès de ses contemporains comme de la postérité le surnom de "Louis le Gros". Son activité débordante et son énergie l'ont également fait surnommer "Louis qui ne dort".

Il tentera durant son règne de 1108 à 1137 d'imposer le prestige de la monarchie aussi bien à l'intérieur de son royaume (comme ses prédécesseurs) que dans l'Europe chrétienne :

  • Il entre en conflit avec les petits seigneurs qui contestent son pouvoir en Ile-de-France en se comportant comme des châtelains brigands : il s'impose face à ces vassaux non respectueux en occupant leur territoire et en faisant détruire leurs donjons. Parmi eux, on peut citer le sire de Montlhéry, Hugues du Puiset (contre qui son père s'était fait humilier en 1081) ou la famille des Coucy.

Construit par les puissants seigneurs de Coucy, le donjon est alors l'un des
plus grands du royaume et défie l'autorité royale : il mesurait 54 m de haut et ses
murs avaient une épaisseur de 7m50 à leur base. Hélas, il ne résistera
pas à la 1ère Guerre Mondiale : il sera dynamité par les Allemands en 1917 !

  • Il défend son royaume face à une tentative d'invasion de la part du puissant empereur d'Allemagne Henri V qui se dirige vers Reims. Il rassemble, en usant du droit de l'ost royal, les chevaliers de son royaume en 1124 pour lui barrer la route. Pour la 1ère fois était levée l'oriflamme et retentissait le cri de guerre : "montjoie Saint-Denis". Il s'agit de la première manifestation, certes modeste, d'unité nationale autour d'un roi capétien.

"On ne prend pas le roi aux échecs !"

Lors de la bataille de Brémule en 1119 contre les anglo-normands de Henri Ier, Louis VI le Gros aurait dit : "On ne prend pas le roi aux échecs !"
Poussé par sa chevalerie et n'écoutant que son courage, le roi se jette sur les Anglais : au plus fort du combat, il parvient de justesse à se tirer d'un mauvais pas en lançant ce cri devenu célèbre, avant de fendre le crâne de l'archer qui croyait le tenir... Il abandonnera tout de même sa bannière puis son destrier !


Adélaide de Savoie :

Adélaïde de Savoie épouse en 1115 le roi Louis VI le Gros qui, à l'âge de 35 ans aspire à une vie calme.
Elle obtient de son mari de se retirer à l'abbaye de Montmartre qu'elle avait fondée avec son fils Louis VII : elle y meurt en 1154, et sa pierre tombale (voir photo) est visible en l'église Saint-Pierre-de-Montmartre.

 

 

 

Photo : Damien Mangin

 

L'abbé Suger, conseiller, historien et impulseur de l'art gothique

L'abbé Suger a laissé un triple héritage :

  • Un ministre avant l'heure, fidèle compagnon du roi

Suger est le compagnon d'étude de Louis VI et ce dernier l'implique dans la vie politique dès le début de son règne : dans sa quête pour étendre son domaine royal, le roi trouve un appui efficace en la personne de Suger.
Il occupe de très nombreuses fonctions :

  • chargé de missions diplomatiques auprès de souverains étrangers,
  • conseillé dans les grandes décisions ou durant les expéditions militaires,
  • il est aussi à l'origine du mariage de son fils Louis VII, futur roi de France, avec Aliénor d'Aquitaine en 1137.

En plus de ce rôle majeur avec Louis VI, il continuera à conseiller activement Louis VII : Suger assurera d'ailleurs une régence efficace lors de la 2ème croisade à partir de 1147.
Suger aura donc incontestablement joué un rôle de 1er plan dans le renforcement de l'autorité royale.

  • Un historien

Il est aussi à l'origine des "grandes chroniques de France", histoire officielle de la monarchie, dont il rédige le 1er volume : "la vie du roi Louis VI".
Il est donc à la source de l'écriture de l'histoire de France.

  • Un impulseur de l'art gothique avec la Basilique de Saint Denis

zoom

Suger est nommé à la tête de la prestigieuse Abbaye de Saint Denis en 1122, et est à l'origine de la nouvelle basilique de Saint-Denis en 1144 où se feront enterrer les rois de France.
Construite sous le mérovingien Dagobert au VIIe, l'église de Saint Denis menaçait ruine : le nouveau bâtiment, dont les travaux seront menés rapidement grâce au zèle pieu de la population voisine, bénéficiera de toutes les techniques modernes de l'époque.

Louis VI qualifiait Saint Denis de "chef et protecteur de la monarchie".

Le style gothique, qui naissait alors en ce milieu de XIIe, reçoit grâce à cette magnifique réalisation une impulsion définitive : on peut ainsi affirmer que la construction de la basilique de Saint Denis en 1144 marque le début du style gothique.
Cette Basilique, véritable nécropole accueillant les sépultures des rois de France, restera le monument symbolique de la monarchie française.

Zoom de la Basilique de Saint Denis

On peut noter qu'à cette époque se fixe une géographie symbolique du pouvoir royal :

  • Paris, lieu de dépôt des archives (Paris ne deviendra capitale que sous Philippe Auguste)
  • Reims, ville du sacre,
  • Saint-Denis, nécropole dynastique et lieu de rédaction de l'histoire royale.

Le développement des constructions religieuses

Depuis l'an mil, l'occident est animé par une fièvre de constructions religieuses : petites églises paroissiales, quasiment chaque village en fera construire une, monastères ou cathédrales au sein desquelles les évêques dirigent leurs diocèses. La cause en est la ferveur de l'époque où tout le monde est croyant.
En 3 siècles, de 1050 à 1350, la France voit s'édifier 80 cathédrales, 500 grandes églises et des dizaines de milliers de petites églises.

Un moine bourguignon écrit à ce sujet : " j'ai vu le monde se secouer pour dépouiller sa vétusté et revêtir de toutes parts un blanc manteau d'églises ".

  • Art Roman :

Durant les XI et XIIe, l'art roman (le nom vient des langues romanes qui se développent à la même époque) s'exprime avec ses murs pleins et épais pour des raisons de solidité : cet art a laissé son emprunte jusque dans les plus petits villages. La sculpture et la peinture murale se développent, mais le décor sculpté reste relativement peu présent. Le transept se développe progressivement, dessinant ainsi au sol une croix plus marquée.
Les constructions sont donc trapues et ténébreuses, conformes à l'idée que l'on se fait de Dieu, impitoyable juge.
L'ordre de Cluny créé en 909 est en plein essor aux XIe et XIIe siècle : il y aura plus de 1000 abbayes filles de Cluny en 1100, toutes exploitant le style roman.

  • Art Gothique :

Le renouveau économique, spirituel et technique des XIIe et XIIIe siècles est à l'origine du renouvellement architectural avec le style gothique et sa recherche de légèreté et de luminosité. Toutefois, le gothique cohabitera avec l'art roman durant deux siècles.


Voûte romane :
le poids repose sur les murs
qui doivent être épais

Voûte gothique sur
croisée d'ogives
,
faisant porter le poids sur les piliers

Le principe de la croisée d'ogives (arc légèrement brisé) est à la base de ce style car il permet au poids de la voûte de porter sur les piliers et non les murs.

Ainsi libérés de ce poids, les murs n'ont plus à être porteurs et peuvent s'amincir et s'allonger : les cathédrales gothiques bénéficient alors de :

  • gigantesques choeurs ouverts et lumineux,
  • verrières dans lesquelles prennent place des vitraux racontant la vie du Christ, des Martyrs et des Saints.

Les pressions latérales exercées par le poids de la voûte sont compensées par des arc-boutants renforcées de contreforts pour contrebuter à l'extérieur les poussées.

Les nefs couvertes par des croisées d'ogives s'élèvent à des hauteurs de plus en plus audacieuses : 37 mètres à Chartres, 42 à Amiens. Mais dès la fin du XIIIe, l'écroulement des voûtes de la nef de la cathédrale de Beauvais élevées à 64m est le symbole d'une limite technique : cet événement marquera la fin de la course au gigantisme pour les cathédrales.

L'édifice obscur de la période romane fait ainsi place aux nefs illuminées par les flots de lumière : l'exemple de la cathédrale Notre Dame de Paris en est un exemple éclatant !


En savoir plus sur le Cathédrale
Notre Dame de Paris

 

 

L'évolution politique, économique et démographique de la fin du XIIIe conduisent à l'abandon de ces constructions gigantesques au bénéfice de réalisations plus modestes où l'embellissement prime sur le grandiose.

Ce style sera qualifié de gothique rayonnant au XIVe puis de gothique flamboyant au XVe.

Les Goths et l'art gothique

Les gens de la renaissance (XVIe) ont désigné du terme "gothique" cet art des cathédrales qu'ils considéraient comme barbare car ne répondant pas à leurs critères de "beauté".
L'art gothique, exploité dans la moitié des 175 cathédrales françaises, dont Notre Dame de Paris, n'a donc rien à voir avec les Goths !

C'est également durant cette période que se développe fortement les pélerinages : Saint Jacques de Compostelle, le Mont Saint Michel ou Rome.

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