Les Vikings et la France féodale de Charles-le-Chauve
(843 - 877)

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Un règne difficile pour Charles-le-Chauve

Suite à la mort de son père Louis-le-Pieux en 840 et au traité de Verdun en 843, Charles-le-Chauve hérite d'un territoire similaire à la France actuelle privée de la Provence, de la Franche-Comté et de l'Alsace-Lorraine. Charles-le-Chauve devient ainsi le roi de la Francia Occidentalis en 843.

Il ne doit pas son surnom à une calvitie, mais au fait qu'il se soit fait raser le crâne lors d'une cérémonie religieuse en signe de soumission à l'église, à l'encontre de la tradition franque exigeant que le roi ait les cheveux longs.

Intelligent et habile en politique, il aura un règne difficile à cause des incursions vikings qu'il ne parviendra pas à contenir : il sera ainsi contraint en 845, 852, 856 et 861 de payer les normands pour qu'ils s'en aillent (ce qui ne les empêche aucunement de revenir par la suite ...). Le roi perd suite à ces affronts toute légitimité.

Le péril viking

Des guerriers et pirates redoutables : depuis leur base scandinave, les vikings ("hommes du nord") multiplient les raids le long des côtes d'Europe depuis la fin du VIIIe avec leurs fameux drakkars. Les vikings sont motivés pour partir en quêtes de meilleurs territoires et de richesses car le leur est hostile, froid, couvert de landes, de bois et de montagnes et ces terres sont difficiles à cultiver.

La puissance de l'empire carolingien les avait initialement incité à éviter le royaume et à concentrer leurs incursions et pillages en Angleterre à partir de 780 puis en Ecosse et Irlande. Au début du IXe, ils mènent également des incursions en Allemagne et aux Pays Bas.

La faiblesse de la Francia Occidentalis de Charles-le-Chauve les incitent à mener dès le IXe leurs raids sur les côtes de la Mer du Nord, de la Manche et de l'Atlantique du royaume carolingien :

  • en 843, une centaine de drakkars attaquent et pillent Nantes : l'évêque de Nantes sera tué dans sa cathédrale avec de nombreux fidèles,
  • en 845 : plus d’une centaine de drakkars remontent la Seine et pillent Paris en brûlant les monastères et les églises. L’armée royale de Charles-le-Chauve, désemparée, s’enfuie. Les vikings quittent la ville contre un tribu de 7000 livres d’argent,
  • en 852 : une centaine de drakkars s’installe en bord de Seine à Jeufosse, à mis chemin entre Rouen et Paris : ils pillent la vallée et incendient à Tours le Sanctuaire de Saint Martin, le plus populaire de Gaule. Charles-le-Chauve, aidé pourtant de son frère Lothaire, n’ose pas intervenir,
  • en 856 : Paris est à nouveau attaquée : ils menacent de tout brûler si on ne leur verse pas une forte somme d’argent : Charles le Chauve s’exécute,
  • ils récidivent en 858 et en 861.
  En savoir plus sur les explorations vikings en Islande, au Groenland ... et en Amérique 500 ans avant Christophe Colomb !

Les drakkars : (=landskip en langue normande)

Ces fameux bateaux, qui accueillaient environs 30 rameurs et pouvaient transporter de 50 à 70 guerrier, avaient les caractéristiques suivantes :

  • dimension effilée : 18m de long en moyenne (difficilement extensible car la quille était constituée d’une seule poutre en chêne) pour 2,5m de large,
  • structure assez plate pour remonter les cours des fleuves à la rame : le tirant d'eau n'était que de 50cm,
  • les flancs étaient constitués de planches qui se chevauchent successivement (comme les tuiles d’un toit) et des boucliers ronds protégeaient les flancs,

Détail de la tapisserie de Bayeux
  • la voile était carrée,
  • le pont ne comportait ni cabine ni banc : les rameurs s’assoient sur des malles contenant leurs armes et leurs rations alimentaires,
  • la proue était souvent ornée d’un dragon sculpté (drakkar en normand).

Les drakkars pouvaient filer à 5 noeuds à la rame et sous conditions favorables, ils pouvaient faire des pointes à 9 noeuds (Orange II a depuis fait le tour du monde à 40 noeuds en moyenne !).

Représentation 3D du site image-in-air3d par pjero

 

L'aristocratie étend son pouvoir : naissance de la féodalité

Les grands du royaume profitent des troubles provoqués par les normands pour reprendre leur indépendance ou bénéficier de nouvelles terres :

  • Pour avoir vaillamment participé à la défense de Tours contre les normands en 853, le roi concède l'Anjou en 864 à Robert-le-Fort. Il sera l'ancêtre des robertiens, qui donnera naissance à la future dynastie des capétiens (voir leur arbre généalogique).
  • Le comte de Flandre reprend son indépendance vers 880, suivi du Duc de Bourgogne.

Impuissant face à cette insubordination, Charles-le-Chauve publie à l'occasion d'une assemblée générale à Quiercy-sur-Oise en 877 un capitulaire reconnaissant le principe d'hérédité des charges et des bénéfices : c'est une immense victoire de l'aristocratie car auparavant, le roi distribuait ses comtés à ses bons vassaux et les reprenait aux moins méritants.

Le roi Charles-le-Chauve meurt en 877 après avoir tenté, suite à une demande du Pape, d'arrêter les sarrasins en Italie du Sud.

Sa mort va encore affaiblir le pouvoir royal des carolingiens : son seul fils survivant Louis II-le-Bègue lui succède : mais aucun successeur ne pourra se passer de l'appui des grands seigneurs que Charlemagne était parvenu à contrôler et ces derniers en profitent pour :

  • étendre leur pouvoir : fabrication de monnaie, levée des impôts, justice, ...
  • assurer la défense que la royauté est incapable d'assurer, en constituant des armées et en construisant des châteaux-fort.

La fin du IXe est donc marquée par la constitution de grandes principautés : le pouvoir du roi est amoindrit et cela contribuera à l'initialisation de la féodalité.

 

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