Evolution de l'idéal de Sainteté
L'idéal de Sainteté a considérablement évolué entre
le début de notre ère et la période mérovingienne :
- vers le IIIe : le Saint était un
martyr, comme Saint
Denis ou Saint Valentin, à l'origine de la célèbre fête des
amoureux du 14 février. Il sera exécuté pour avoir continué
à célébrer des mariages catholiques à une époque où les romains
s'y opposaient.
- entre le IVe et le Ve : il s'agissait
plutôt d'un confesseur ou d'un ermite,
- à partir du VIe : la carence des
structures politiques et sociales va rendre la sainteté active.
Elle se développe dans l'effondrement des cadres de la
cité et devient une action pragmatique au service de la collectivité
en donnant naissance aux 1ères communautés monastiques
en occident : on peut citer en exemple Saint
Martin ou Cassien (après avoir été moine
à Bethléem pendant 20 ans, il fondera la monastère
Saint-Victor à Marseille vers 415).
Saint Benoit de Nursie, patron de la chrétienté
occidentale (490 - 547)
Benoit naît en 490 en Nursie en Italie centrale et ses parents
aisés le destinent à une carrière administrative.
Sa ferveur l'incite à vivre en ermite dans une grotte pendant
3 ans pour se consacrer à la prière et la méditation
religieuse : "Voulant plaire à Dieu seul, il habita
avec lui-même sous le regard de Dieu" (citation du
pape Grégoire le Grand, 540-604).
Benoit accepte d'être abbé, détail d'une
fresque du cloître de Monte Oliveto Maggiore
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Il s'établit en 534 au mont Cassin (en Italie entre
Rome et Naples) et y fonde un monastère dans lequel il rédigera
sa célèbre "règle monastique de
Saint Benoit" jusqu'à sa mort en 547. Cette
règle décrit la vie spirituelle
et matérielle des moines ainsi que l'organisation du
monastère en faisant preuve d'une grande compréhension
de la psychologie humaine. Il s'est probablement inspiré
de textes anciens de Basile et de Cassien (qui a fondé
le monastère Saint-Victor à Marseille vers 415).
Le monastère du mont Cassin sera détruit par
les lombards à la fin du VIe, et la dépouille
de Saint Benoit sera retrouvée dans les ruines au VIIe
avant d'être transférée à l'abbaye
de Fleury-sur-Loire.
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En introduisant une règle monastique équilibrée,
fondée sur la réhabilitation du travail manuel et
du travail intellectuel et en invitant aussi ses moines à
redécouvrir l'héritage intellectuel de l'Antiquité,
Saint Benoît a ouvert la voie à un monde nouveau :
- le pape Grégoire le Grand (590-604) s'emploiera à diffuser
cette règle, ce qui contribuera au développement
des abbayes bénédictines dans toute l'Europe durant les VII et
VIIIe,
- Charlemagne va largement promouvoir cette règle dans le but
de pacifier et d'unifier son territoire. En 817, son fils Louis
le Pieux imposera à tous les monastères d'occident de la respecter,
- le nom de "Benoit" donnera naissance à l'ordre
des "bénédictins", ordre d'appartenance
des futurs clunisiens et cisterciens : il peut à juste
titre être considéré comme le père
du monachisme occidental.
Cette performance est d'autant plus remarquable qu'elle intervient
dans une société en décomposition où
la paix romaine a depuis longtemps cédé la place
aux guerres entre barbares. Il s'agit du legs spirituel le
plus important que la période mérovingienne laissera aux siècles
suivants.
Saint Benoît de Nursie a mérité
pour cela d'être proclamé en 1958 père
de l'Europe et saint patron de la Chrétienté
occidentale.
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Règle de
Saint Benoit
L'objectif de cette règle est de parvenir à la sainteté en laissant
la "grâce de Dieu agir progressivement en soi"
:
- respect du silence pour laisser parler Dieu,
- obéissance au supérieur,
- humilité, pauvreté et charité,
- partage du temps entre 8 prières quotidiennes (dont les
vigiles entre 2 et 3h du matin), le travail manuel
(conçu comme une libération spirituelle) et les lectures
sacrées (lectio divina).
La règle de Saint Benoît
distille en fait certains concepts étonnamment modernes
... qui font aujourd'hui encore référence en
matière de management.
Sur ses 73 chapitres, dont certains sont périmés
ou sans lien avec l'entreprise, on peut citer :
- le fait que le travail quotidien soit clairement réparti
: chacun sait ce qu'il doit faire avec une répartition
des tâches individuelles et un roulement pour les
tâches d'intérêt général,
- le rôle qui est confié à l'abbé
: "une fois nommé, l'abbé saura qu'il
doit servir et non asservir". Il doit donc remplir
sa mission et accompagner ceux qu'il dirige dans l'accomplissement
de la leur". C'est ce qu'on demande aujourd'hui
au manager !
- la notion de prise en compte de l'individualité
en "se pliant aux caractères multiples et
en sadaptant à tous selon les dispositions
et l'intelligence de chacun".
- la collégialité des prises de décision
: "chaque fois que des affaires importantes devront
être traitées au monastère, l'abbé
convoquera toute la communauté et dira lui-même
de quoi il s'agit. Après avoir entendu l'avis des
frères, il réfléchira et fera ce qu'il
juge le plus utile". Cette position ne ferait pas
l'unanimité dans tous les conseils d'administration
!
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