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Les Quatre
Châteaux de Lastours |
"Dramatiques comme des squelettes, les ruines ont une majesté
sobre, une grandeur dépouillée : elles sont l'histoire figée
dans la pierre" (je ne connais hélas
pas l'auteur de cette citation).
Le village de Lastours est situé à 18km
au nord de Carcassonne entre les villages de Mas Cabardès
et Conques-sur-Orbiel (voir
une carte de la Région).
Les 4 châteaux du site, Cabaret,
Tour Régine, Surdespine
et Quertinheux, sont perchés au sommet
dune crête qui domine la vallée à plus
de 300m. L'accès seffectue via un magnifique sentier
qui traverse la garrigue hérissée de cyprès,
et permet de découvrir au fur et à mesure le panorama
exceptionnel de lensemble du site.
Litinéraire traverse une grotte, le Trou
de la Cité, dans laquelle a été retrouvée
en 1961 la sépulture dune fillette datant de 1500 ans
avant notre ère.
Cette position stratégique contrôlait depuis le haut
moyen âge une des principales voies de pénétration
dans le Cabardès, qui donnait accès entre autres aux
richesses minières de la Montagne Noire.
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Photo JFM : vue de Cabaret (à gauche) et de
Tour Régine (à droite) au milieu des cyprès

Photo JFM : vue depuis Cabaret de gauche à
droite : Surdespine, Tour Régine au 1er plan et Quertinheux
Historique
La première mention du site remonte à 1063 : les seigneurs
des lieux étaient vassaux des comtes de Béziers et de Carcassonne
et tiraient leurs richesses des mines de fer alentour. Cette promiscuité
de 3 forteresses (Tour Régine n'existait pas à l'époque)
illustre l'émiettement du pouvoir des seigneurs féodaux.
Le seigneur des lieux en 1209, Pierre-Roger de Cabaret, était
protecteur des cathares et leur
offrit asile : cet affront provoquera dès lors la foudre des croisés
:
- La siège de Simon
de Montfort échouera en 1210 grâce à une résistance
exemplaire et au fait que le site était inaccessible aux engins
de guerre de l'époque,
- Après la reddition de Termes en 1211 et pour une raison obscure,
le seigneur de Cabaret se soumet volontairement
et ralliera même
les rangs de l'ennemi,
- Les hostilités ne s'arrêteront pas pour autant et une
communauté menée par un évêque cathare y
séjournera ensuite dès 1223 : un nouveau siège
des croisés sous le commandement de Humbert de Beaujeu aura lieu
en 1227
mais échouera encore.
- Il faudra attendre 1229 pour assister à la reddition définitive
des cathares qui occupent les lieux.
Finalement, les forteresses héroïques tomberont dans le domaine
royal en 1243 : le roi de France rase les châteaux en signe de représailles
avant de les faire reconstruire sur la crête, en y adjoignant un
nouveau bâtiment : la Tour Régine.
A la fin du XVIème siècle pendant les guerres de Religion,
le site constitue une plate-forme importante pour les protestants qui
l'aménagent pour les armes à feu. Ils en seront délogés
en 1591 par le Maréchal de Joyeuse.
A la révolution, les châteaux de Lastours sont définitivement
abandonnés avant d'être classés au titre des Monuments
Historiques en 1905. Depuis une vingtaine d'années, le site est
en cours de restauration.
CABARET

Le château de Cabaret est le plus grand des 4 bâtiments et
comprend trois parties :
- un donjon polygonal à cinq pans
: la salle-basse est couverte en berceau brisé. Il est percé
de sept archères simples et d'une remarquable fenêtre en
plein cintre. Un escalier à vis intérieur dessert en son
sommet une voûte gothique partiellement éventrée,
qui semble tenir par magie !
- un corps de logis rectangulaire,
- une courtine polygonale qui enveloppe
l'ensemble et dans laquelle ont été adossés des
bâtiments. Le chemin de ronde au sommet des courtines repose sur
des arcades en arcs brisés largement visibles. On devine au nord
les restes d'une tour carrée.
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Photos JFM : vue du logis et des arcades en arcs
brisés qui supportaient le chemin de ronde
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Un dispositif de défense en arc de cercle protégeait l'entrée
principale, à l'Ouest de l'enceinte.
Un escalier extérieur accolé au mur Nord du logis permettait
d'accéder au chemin de ronde: il doit être postérieur
à la construction du logis puisqu'il obture trois archères
de ce bâtiment.
TOUR RÉGINE
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Le château est composé d'une tour
ceinturée par une courtine polygonale
dont seule la partie Sud est conservée.
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Il sagit dune forteresse royale édifiée
vers 1260 grâce aux moyens matériels et financiers
du Roi de France. Elle est la réplique de certaines tours
de l'enceinte du château Comtal de la Cité de Carcassonne.
Les archères "à étrier" sont parmi
les éléments défensifs les plus remarquables
de la tour : ces ouvertures comportent une fente à base triangulaire
datée du milieu du XIIème siècle.
Dans la partie supérieure de la tour, une double rangée
de trous de boulins est bien visible : ces orifices servaient à
recevoir des pièces de bois qui soutenaient les hourds.
On y accédait par des baies rectangulaires aujourd'hui à
l'état de vestiges (voir photo).
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Photos JFM : Vue des archères - On devine
sur la façade les trous de boulins qui supportaient les hourds
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A l'Ouest, la tour est percée d'une porte située à
l'étage, desservie par un escalier en bois. Le premier étage
a vu l'aménagement d'un demi-plancher en bois qui permet, à
l'aide d'un escalier, d'accéder au rez-de-chaussée. Celui-ci
abrite essentiellement une citerne. Le deuxième étage est
desservi par un escalier en bois hélicoïdal aménagé
à l'Est et éclairé par des meurtrières.
SURDESPINE

D'allure compacte, le monument est dominé par une tour
carrée séparée d'un logis
et accolé à une citerne.
Une courtine trapézoïdale protège
l'ensemble, dont la partie haute a été restaurée.
Deux entrées étaient aménagées :
- l'angle Nord-Ouest de l'enceinte abritait probablement l'entrée
principale du château, aujourd'hui remplacée par une brèche.
- un second accès était aménagé au Sud-Ouest.
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Photos JFM : vue de la tour carrée et du
logis - Fenêtre en plein cintre
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Le château, qui se singularise par la rareté de ses meurtrières,
est percé de quatre fenêtres en plein cintre.

Des lambeaux de muraille au milieu de la garrigue,
c'est ainsi qu'apparait Surdespine, "dramatique comme un squelette"
QUERTINHEUX

Le bâtiment initial date de 1100, mais il a été fortement
remodelé au XIIIe. Il comporte :
- une tour circulaire : élevée
au milieu du XIIème siècle par le pouvoir royal, elle
est une synthèse de Cabaret et de Tour Régine par son
plan, ses dimensions, ses archères ou son escalier à vis.
On aperçoit sa voûte gothique sur croisée d'ogives
à travers une ouverture aménagée dans la dalle
de béton, qui assure la stabilité de la structure depuis
1966.
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Photos JFM : Vue d'ensemble du château - Angle sud de la
courtine avec le donjon
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- une vaste courtine polygonale sur laquelle
repose via des arcs brisés le chemin de ronde et contre laquelle
des bâtiments sont adossés. Les canonnières se sont
adaptées aux progrès de l'artillerie vers 1500.
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Photos JFM : Arcs brisés sur lesquels repose
le chemin de ronde - Meurtrières dans un arc brisé
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- une large avancée en chicane
qui défend l'accès principal.
Quertinheux est doté de deux citernes :
- une première attenant à la tour recueillait l'eau
des toitures grâce à un conduit en tuiles,
- une seconde destinée à recevoir l'eau du chemin
de ronde.
Photo JFM : Entrée de la courtine,
accessible depuis la chicane d'accès
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LE VILLAGE MEDIEVAL
Des fouilles archéologiques menées depuis plus de 20 ans
au pied du château de Cabaret ont permis de mettre à jour
le village médiéval de Cabaret, haut lieu du catharisme
et de la résistance contre les armées croisées.
Ancien habitat fortifié, il comprenait une centaine de maisons
d'habitation ainsi que de nombreuses forges.
Ces lieux ont été abandonnés brutalement sans
que les habitants aient pu emporter le moindre objet : on retrouve
le bois consumé dans le foyer, les restes du dernier repas,
les poteries culinaires encore en place, ... Ce mobilier très
diversifié est antérieur au milieu du XIIème
siècle et coïncide avec la reddition de la forteresse
en 1229. La destruction du castrum par l'administration royale doit
se situer vers 1240.
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Vue
satellite des châteaux Lastours : photo IGN, visible sur le site
Geoportail
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